Jean-Baptiste Isabey (1767-1855)

Dans la nuit du 13 au 14 février 1820, Charles-Ferdinand d'Artois, duc de Berry, est assassiné par le bonapartiste Louis-Pierre Louvel, animé par la volonté de « détruire la souche » des Bourbons. Sa veuve, Marie-Caroline des Deux-Siciles, déjà mère d’une fillette et enceinte au moment du drame, donne naissance sept mois et demi plus tard à un fils, l’héritier tant espéré du trône.

C’est ainsi que naît Henri Charles Ferdinand Marie Dieudonné d'Artois, duc de Bordeaux, plus connu sous son titre de courtoisie de comte de Chambord et surnommé alors par le poète Alphonse de Lamartine l'« enfant du miracle ».

Le 11 octobre 1820, une souscription nationale permet de donner au prince le château de Chambord.

Réalisé pour la duchesse de Berry, ce dessin au ton résolument festif commémore l’arrivée du duc de Bordeaux à Chambord peu après sa naissance.

Avec son impressionnante minutie caractéristique, Isabey compose une scène foisonnante de détails, animée aux portes du domaine, tandis que l’imposant château se dresse majestueusement en arrière-plan.

La duchesse de Berry, sortant de la calèche, tient la main du duc de Bordeaux porté par une autre femme, pour le présenter au peuple. Une foule de personnes de tout âge et de toutes conditions, soldats, enfants, misérables, blessés, ecclésiastiques, musiciens, sont venus acclamer le prétendant au trône. Un groupe de petites filles sous une bannière ornée de ces mots touchants“ Nos coeurs et nos fleurs”, rend hommage à leur futur roi en offrant des bouquets. Au premier plan s’est improvisé un restaurant dont le nom “Aux Bienvenus”  est inscrit sur une enseigne de fortune ajoutant une touche de spontanéité à l’événement.

Cette œuvre a été par la suite gravée en 1821 par Jean-Baptiste Isabey lui-même et dédiée à Son Altesse Royale Madame la Duchesse de Berry.

Jean-Baptiste Isabey, formé à la peinture d’histoire par Jacques-Louis David, se fait connaître sous la Révolution comme miniaturiste et dessinateur. Profitant d’un contexte favorable à la diffusion de portraits accessibles, il impose son style sobre et réaliste. Intime de Joséphine de Beauharnais, il devient sous le Directoire l’un des portraitistes les plus influents et joue un rôle clé sous Napoléon, réalisant plusieurs œuvres officielles. Grâce aux titres et aux fonctions qu’il accumule, il obtient une reconnaissance artistique majeure.

Ses anciens engagements bonapartistes ralentissant son ascension sous la Restauration, il se tourne alors vers l’aquarelle et la lithographie. Il excellera dans ce domaine comme en témoigne notre dessin.